Une rentrée en douceur
Pour moi, chaque rentrée vient avec son lot d’émerveillement, de stress, de joie et d’inquiétude. Tel une girouette, mon état d’esprit change, parfois d’une minute à l’autre, passant de la joie d’entamer cette année toute fraîche, à l’anxiété des premiers jours. Présentement, je peux vous affirmer que très peu d’enseignants décrochent en cette fin de semaine précédant l’arrivée des élèves. Les classes sont bien rangées, bien décorées, les photocopies sont prêtes, le matériel aussi. Mais, le sentiment de ne pas être à la hauteur, de ne pas avoir préparé suffisamment d’activités, d’avoir oublié certaines choses, lui, demeure. La rentrée, c’est complètement fou pour un enseignant! Je compare souvent cela à un soir de première pour un artiste, sauf que nous aurons le même public dans la salle jour après jour durant une année entière. De quoi stresser!
Et moi, comme à chaque année, je regarde ma planification de la semaine. Celle que j’ai faite judicieusement en mai et juin derniers. Et je me dis que j’ai oublié, encore! Combien d’objectifs ai-je ciblés pour ces deux premières semaines? La réponse est… beaucoup trop! J’ai beau enseigner à un niveau différent cette année, passant de la 1re à la 4e année , mais enfin, où avais-je la tête quand j’ai fait cette fameuse planif! Ce n’est pas parce que mes futurs élèves auront 3 ans de plus qu’à l’habitude que je dois changer mon modus operandi de toujours. Et quel est-il? Je vous explique…
Dans ma carrière, j’ai eu la chance de rencontrer des gens qui m’ont transmis des valeurs essentielles, soit celles qui sont centrées sur les besoins des humains. Voilà. On est loin de l’enseignement explicite, de la dernière recherche probante et de la pédagogie, n’est-ce pas? Mais à ce jour, je considère que ces valeurs et ces convictions sont mes plus grands atouts comme enseignante. Donc, ce que je m’efforce à faire chaque année à la rentrée, c’est de créer des liens avec mes élèves. D’après moi, c’est la seule façon de m’assurer que l’année qui viendra sera agréable et réussie. Et je peux même me rappeler des années difficiles où j’ai été trop rigide, où je n’ai pas pris le temps de parler et jouer avec mes élèves. Où j’avais la tête dans les objectifs plutôt que dans le coeur.
Qu’est-ce que ceci implique? Le mot qui me vient en tête, c’est la douceur. Douceur dans ma façon d’être, de parler, mais aussi dans les exigences que j’aurai envers mes élèves. Ceci implique que je ne pourrai pas venir à bout de ma planification idéale, faite la tête dans les nuages, et que je devrai modifier certaines choses. Le premier jour, je leur demanderai de tout ranger leur matériel dans leur bac, et de s’approcher de moi, pour discuter. Nous prendrons le temps de nous connaître, de rire, de découvrir l’endroit où ils passeront plus de 35 heures par semaine. Nous passerons du temps autour de l’école, à jouer, à prendre des selfies avec les copains, à nous rappeler nos bons moments des vacances. Le lendemain? On recommencera, puis on sortira les tablettes, les cahiers, pour travailler un peu. Et peu à peu, on dira au revoir à l’été et on s’installera dans la routine (arrrgg que je déteste ce mot!).
Voilà ma rentrée idéale. Je ne voudrai pas les « casser » avec mes regards sévères et tout planifier à la minute près. Je refuse cette philosophie de bonne femme selon laquelle les premières journées doivent être réglées au quart de tour, comme si les enfants entraient à l’armée! Voyons! Les règles de la classe, nous les bâtirons ensemble. La satanée routine, on l’apprendra bien assez vite. Et pour le reste, je me fie à mon instinct de professionnelle pour juger quand le bon moment viendra.
Je souhaite une belle rentrée, en douceur, à tous les collègues que je côtoie quotidiennement, en vrai ou en virtuel. Sachez que grâce à vous, je deviens une meilleure pédagogue et surtout, un meilleur être humain.
*Pour poursuivre la réflexion, voici un excellent article sur la rentrée en Finlande et qui m’a inspirée à écrire ce billet (en anglais).